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Torrance etc

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20 juillet 2006

The Pipettes : Time Machine à tubes

the_pipettes_cover_album

Vous avez toujours eu le secret désir de vivre les 60's, leur insouciance surannée, leur vent de libre folie ? Vous avez toujours rêvé de croiser dans la rue de jolies jeunes filles peinant à cacher leur sex-appeal brûlant derrières des robes à pois virevoltantes ? Peut-être pas vous, mais moi en tout cas. Si ce vent de nostalgie mal placée pour une époque que vous êtes loin d'avoir connu (les enfants des 70's levez les doigts !) vous étreint parfois sans pouvoir être satisfait. Si vous avez passé votre adolescence et votre adulescence à hocher la tête sur les Shirelles, Marvelettes, Supremes, The Cake, Tammys et autres Shangri-La's. Si Phil Spector est pour vous la réincarnation du Prophète. Alors, embrassez THE PIPETTES !

Et quand je dis embrassez, ce n'est pas au sens littéral, bien que vu le charme incandescent de ces trois anglaises aux joues roses, on comprendrait. Non, embrassez, comme rejoignez en une fusion quasi mystique. THE PIPETTES ou la résurrection du "girls group" d'antan, où des jeunes filles en fleur déclinaient avec une insouciance bornée de crypto-concupiscence des rengaines pop à base de "shalala", "whoo" et autres "yeah yeah yeah". THE PIPETTES, ou le retour en force des collants noir et des robes à pois. Et surtout, la plus imparable machine à remonter le temps que l'année 2006 ait créé. Voire la plus redoutable des machines à tubes.

pipettes_dans_les_boisAprès plusieurs semaines d'extase à me passer en boucle leur chanson "Your kisses are wasted on me", me voilà donc enfin en possession de leur premier album "We Are The Pipettes", glané avec bonheur sur l'iTunes Music Store français un bon mois avant sa sortie en magasin. En bonus, petit plaisir de "nerd": un 45 tours vinyle du dantesque single "Pull Shapes". Et… whoa. Déjà, cela peut paraître trivial, mais en bon représentant du néanderthal de base que je me refuse à être la plupart du temps, trois anglaises s'approchant à peu près de mes standards personnels de perfection cela ne se refuse pas (mention spéciale à la bouleversante brunette Rose, à gauche sur la photo). Mais quand en plus elles ont autant à voir musicalement avec les Spice Girls que Johnny Cash avec Bézu, eh bien, le bonheur n'est que double.

A l'écoute de cette collection de 14 morceaux (16 pour la version iTunes, merci tonton Apple), une évidence toute simple sous forme de questions à choix unique. THE PIPETTES écriront-elles l'histoire de la musique moderne ? THE PIPETTES seront-elles encore là dans dix ans ? THE PIPETTES seront-elles reconnues comme initiatrices d'une révolution ? THE PIPETTES sont-elles nos nouvelles meilleures amies ? Des questions auxquelles on peut évidemment répondre a priori par la négative. Sauf pour la dernière. Mais après tout, si THE PIPETTES ne survivent pas à leur premier album, si elles sombrent dans l'anonymat dans 18 mois, quelle importance ? Pas tous les groupes peuvent être ARCADE FIRE ou SUFJAN STEVENS. Mais surtout, THE PIPETTES, qui ressuscitent avec bonheur une musique 60's de pur acabit, jouent ici la carte de l'immédiateté pop parfaite. La pop est parfois jamais aussi belle que lorsqu'elle est éphémère, vouée à marquer d'un souvenir mélancolique une période de sa vie. Si 2006 restera dans ma mémoire avec THE PIPETTES en bande originale, j'aurais sans doute gagné mon année. Et le souvenir sera délicieux.

(putain de saut de ligne qui ne fonctionne pas, ça foire toute la mise en page, damn it !)

Pipettes_au_micro

Après ces digressions, il serait peut être temps de parler de musique ! THE PIPETTES, ou comment pondre des morceaux dépassant rarement les 3 minutes (voire les 2 minutes) et qui entrent profondément dans le cortex pour ne pas en sortir. Des petits standards tout droit sortis de cette lignée évoquée plus haut : Spector, Ronettes, Shangri-La's, Motown, Stax, Joe Meek... Soit des mélopées douces et énergiques qui donnent envie de remuer ses couettes (quand on en a) sur la piste de danse, de s'adonner au twist, de conduire une bonne vieille Renault 4CV décapotable, ou d'aller au drive-in. "We are The Pipettes" ou un ensemble de chansons toutes plus accrocheuses, chantantes, dansantes, euphorisantes les unes que les autres. Mention spéciale à l'incroyablement old school "Pull Shapes" : des envolées de cordes jamais vues depuis la Motown, une batterie Ringo Starr-esque en diable (binaire mais efficace), une mélodie balancée au couteau par nos trois Pipettes, une grosse ambiance bal de promo à Hill Valley, des "clap clap" fendards et un refrain aussi hautain qu'innocent. Hautain et innocent. Voilà donc THE PIPETTES : trois jolies jeunes filles totalement délurées, faisant leur musique sans aucune retenue, peu importe l'anachronisme vibrant qu'elles constituent, et surtout, sans qu'aucun plan marketing les y ait a priori forcées. Le menton bien levé en signe de fronde anti-phallocrate, de jolis garçons jouant des instruments derrière elles. Et les bras balancés en l'air avec grâce et insouciance l'air "oui, et en plus d'être talentueuses, on sait danser n'importe comment". Avec leurs légers accents garage (cf chanson "We are The Pipettes"), leur mignonne arrogance à toute épreuve ("We're the prettiest girls you've ever met") et leur singularité à contre-courant, THE PIPETTES ne seraient-elles pas tout simplement un énorme groupe punk ? C'est Jacqueline Taïeb qui serait fière.

pipette_rose

Alors, honnêtement, plutôt que de lire cette (trop) longue review enflammée sur nos nouvelles meilleures amies, ne devriez-vous pas déjà être sur iTunes Music Store pour vous procurer cet album ? (non, je n'ai pas d'actions Apple). Ne devriez-vous pas déjà sautiller dans tous les sens sur "Dirty Mind" et son piano bringuebalant ? Vous dandiner sur le remarquable "Guess Who Ran Away With the Milkman" et sa mélancolie guillerette ? Ou encore sur "ABC", "Sex", "One Night Stand", "Judy" et j'en passe ? Ben si, vous devriez déjà. Ce serait vraiment dommage de passer à côté.

Pour ceux que ça intéresse, sachez que nos amies THE PIPETTES seront en concert gratuit à Paris ce samedi 22 juillet au Parc André Citroen. De quoi remonter le temps et oublier cette satanée canicule. En espérant qu'elles nous fassent grâce d'un concert plus intime bientôt (qui prie pour La Cigale au Festival Inrocks en novembre ?).

Et pour les plus curieux, voici quelques liens utiles :

www.thepipettes.co.uk

www.myspace.com/thepipettes

Bonne Pipettes-Semaine. Et promis, la prochaine fois, j'arrête les mots composés à base de Pipettes.

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1 juillet 2006

De l'acier et du vin

1724269_ironandwine_200x200_1Iron & Wine : Album "Our Endless Numbered Days" C'est qui ? Derrière le pseudo Iron & Wine, se cache un seul homme, Sam Beam, sorte de redneck barbu (voire très barbu), dont la discographie s'amplifie de mois en mois, tant le bonhomme semble être un acharné de travail, ou un génie prolifique pour qui aligner les chansons parfaites serait aussi facile que pour Madonna d'aligner les tubes dance de seconde zone. Je précise quand même que Beam, même s'il EST Iron & Wine puisqu'il écrit et compose tout, est accompagné d'un groupe très solide, dont sa soeur, qui assure des choeurs toujours d'une beauté incommensurable. Deuxième précision : il est signé sur le label Sub Pop... gage de qualité s'il en est (Afghan Whigs, The Jesus and Mary Chain, Mudhoney, Nirvana...) C'est quoi ? Iron & Wine donne dans le folk acoustique. Sam Beam verse dans une musique doucereuse, loin de tout foisonnement sonore grandiloquent. Mieux, le bonhomme n'offre aucune "attitude" à plagier, ou aucun décorum à suivre. Le gars fait une musique, qui illustre parfaitement un certain air du temps. Sans pour autant être générationnelle. Car la musique d'Iron & Wine est tout autant intemporelle qu'universelle. C'est qui ses potes ? Avec des potes aussi recommandables que The Shins, Death Cab For Cutie ou Calexico, Iron & Wine s'inscrit dans une des familles les plus intéressantes de la musique indé nord-américaine d'aujourd'hui... ourendlessCe deuxième album, "Our Endless Numbered Days" tourne sur ma platine depuis plus d'un an et des bananes, et je me suis enfin décidé à faire partager ce joyau dont l'ascendance a énormément à voir avec un certain Nick Drake, sans avoir ni la putasserie de le copier ou l'outrecuidance de se réclamer de lui. "Our Endless..." est avant tout un ensemble de petites chansons dépressives au premier abord. Avec des mélodies d'une simplicité retournante, Sam Beam livre 12 pépites à la fugitive beauté, qui pourtant, s'incrustent dans le cortex pour ne plus en sortir. Au mieux, cette musique vous transportera dans les effluves de la mélancolie contemplative, au pire, sera la bande son de votre vie. Avec ce folk débarrassé de toute pose, Beam tricote donc 12 chansons pour la plupart totalement acoustiques (avec une seule guitare en pilier), et dont les arrangements, d'une finesse confinant à l'orfèvrerie, soulignent toujours avec discrétion la délicatesse des rythmes, paroles, instrus. A ce titre, l'ouverture de l'album, "On Your Wings", ouvertement western, donne le ton, tout en trompant l'auditeur : si l'on s'attend à un album aux rythmiques appuyés et aux guitares slide saillantes (le cas sur ce morceau), Beam brille surtout ici par des mélopées envoûtantes et des paroles à la fois poétique et délicates. Pour asséner juste derrière une balade à chialer dans sa bière : "Naked As We Came". Un joyau insurpassable, dénué de tout cynisme, et faisant entrer l'album dans un vif du sujet bouleversant. Dès lors, Sam Beam déroule le reste de ses chansons avec une conviction timide et confirme l'évidence : ce gars là a du génie. Un génie simple, évident, accessible, qui lui permet d'écrire des chefs d'oeuvre à la vitesse d'un TGV lancé en flèche. Que ce soit la western et entraînante "Teeth in the Grass" (ambiance barbeuq au centre des Apalaches, feu de camp, calumet de la paix entre cow boys et indiens), ou la berceuse "Radio War" (imparable), le bonhomme a tout juste à chaque chanson. L'auditeur, lui, sombre inévitablement dans un état proche du Wyoming : larmes, frissons, envie de remercier la Terre entière pour ce cadeau.Et c'est comme ça pendant tout l'album : "Love And Some Verses", et ses arpèges follement Donovan-esque ou Drake-esque, est peut-être l'une des meilleures chansons écrites des cinq dernières années. Alors, avec toute cette délicatesse, ces instrus d'une simplicité contagieuse, ces arrangements discrets, ces paroles brillantes et ce chant habité et doux comme une nuit d'amour, on pourrait vite tomber dans la guimauve sirupeuse ou la dépression éhontée. Mais non, car le bonhomme transpire la décence et l'honnêteté... faisant de chaque chanson une ode personnelle, un ami pour la vie. Toutes les chansons sont plus brillantes les unes que les autres, et la fin de l'album se permet le luxe d'aligner quatre chansons d'une transcendance rarement atteintes depuis les années 70 : "Fever Dream" dont la seule intro est une fulgurance de beauté éclatante, "Sunset soon forgotten", "Sodom South Georgia" ou comment un papa meurt le sourire aux lèvres sur une mélodie déchirante et une ligne de guitare sèche limpide, et la délicieuse "Passing Afternoon" (qui donna lieu à un EP hautement recommandable)... Bref, décrire "Our Endless Numbered Days", c'est accumuler les superlatifs ! Paradoxe étonnant puisque la musique de Sam Beam, est tout sauf superlative, ostentatoire, superficielle. Ecoutez cette mirifique oeuvre. Un artiste capable de pondre un album pareil de nos jours, sans succomber aux sirènes de la hype, du commercial, de l'attitude et du porte drapeau, ne peut que réjouir les amateurs de musique que nous sommes. Sam Beam aurait pu être un songwriter des années 70, à la pureté transcendante. Et si cela avait été le cas, il aurait été le pendant d'un Bob Dylan, ni plus ni moins. Et Dieu que ça fait du bien de voir des gars des années 2000 pondre des disques intemporels sans s'inscrire dans un revival putassier ! Globalement, tout ce que j'ai écouté du bonhomme frise le génie et l'indiscutable. Alors petite review rapide des incontournables d'Iron & Wine : thecreekAlbum "The Creek Drank The Craddle" Premier album, à la fulgurance acoustique dantesque. Un premier essai, comme un brouillon de "Our Endless Numbered Days". Sorti en septembre 2002, soit seulement six mois avant "Our Endless..." : qui a dit "prolifique" ? womanking"Woman King EP" Un maxi sorti en février 2005, dont la beauté certifie que "Our Endless..." n'était pas un coup de chance. Avec en prime la sublime "Jezebel", ou comment mettre le monde à genoux en 7 minutes. inthereins"In The Reins EP" Un maxi sorti... en septembre 2005 ! Particularité : le son s'y fait plus électrique, pour la simple et bonne raison que Iron & Wine fait ici équipe avec Calexico. Les chansons de Beam gardent leur simplicité, leur limpidité et leur beauté, le tout saupoudré de l'ambiance tex-mex de Calexico. La chanson éponyme est tout simplement sublime, avec des choeurs chicanos à fendre le coeur. Et puis, parce que le bonhomme est de plus en plus courtisé par les music supervisors d'Hollywood (en voilà qui ont un beau métier), deux superbes chansons écrites pour des films et pour l'instant absentes de tout disques siglé Iron & Wine : "The Trapeze Swinger" Une épopée folk acoustique de près de 10 minutes, dont on voudrait qu'elle ne s'arrête jamais. Sur la BO d'IN GOOD COMPANY. "Such Great Heights" Sur la BO du très très bon GARDEN STATE, cette chanson est une reprise du groupe The Postal Service, formation électro (fort recommandable) du leader du groupe de rock indé Death Cab For Cutie (eux aussi fort recommandable) Ben Gibbard. Mais le tour de force est que Sam Beam livre ici une version plus que personnelle, qui n'a plus grand chose à voir avec la fabuleuse version originale. Nouvelle pépite. Y a plus qu'à acheter tout ça...
28 juin 2006

"A la prochaine révolution, je retourne mon pantalon"

zidanethuram

Les voilà donc tous les opportunistes, tous les retourneurs de veste en chefs, les cuistres incapables de fermer leur clapet plus de deux minutes. Les voilà donc ceux qui considéraient que le Togo allait corriger les Bleus. Qui arguaient que Zidane était mort. Que Thuram était fini. Que Vieira n'avait pas sa place. Les voilà les Gaulois bas du front et gras du cerveau. Les voilà dans la rue, klaxonnant comme un bœuf brame du fond de son enclos. Les voilà criant leur amour aux Bleus et considérant à 75% que la France va battre le Brésil samedi soir en quart de finale. Dans sa versatilité légendaire confinant au foutage de gueule d'anthologie, le peuple français a donc retrouvé sa joie de vivre, de crier, de klaxonner sur les Champs, et a très vite oublié ses propos d'il y a à peine dix jours. Pendant quelques jours, ils vont s'extasier devant les pubs des Bleus, se rappeler du glorieux héritage. Et acheter des maillots. C'est Adidas qui va être content. Maintenant, il faut espérer pour les Bleus qu'ils fassent au moins un gros match contre la Seleçao. Car sinon, ils peuvent se préparer au bûcher et tranquillement se consumer comme une pucelle d'Orléans.

De leur côté, les quelques personnes qui ont toujours cru à ces joueurs là, sans pour autant sombrer dans l'idolâtrie béate et stupide, rigolent bien. Il faut dire une chose. Je me marre comme jamais. Bon, certes, j'ai plus de voix pour rire à gorge déployée. Mais mon corps sursaute de poilade contenue d'entendre les gens dans la rue ou au bureau (non, Mika, je ne te vise pas !) vibrer comme au bon vieux temps de la France Black-Blanc-Beur. Le cynisme n'est pas bon pour la santé, mais là, c'est presque trop beau pour être vrai. Jouir de l'ignorance crasse de tout un peuple et de sa capacité à l'hypocrisie et à l'amnésie aigüe reste un grand privilège, qui, aussi futile soit-il, reste hautement bandant. Préparez le maquillage pour samedi, les banderoles, les drapeaux, les maillots, faites réviser le klaxon. Samedi sera un gros soir. Défaite ou pas. Victoire ou pas. Le Brésil n'aura pas l'outrecuidance de regarder les Bleus avec condescendance. Ce n'est pas un hasard si Roberto Carlos espérait la victoire de l'Espagne… Bleus contre Jaunes : le beau football attend et honnêtement, tant que l'équipe de France mouille le maillot comme elle l'a fait hier contre les Ibériques, tant que l'esprit qu'elle a démontré hier est encore là, tout le monde pourra être content. Tout le monde, sauf les bas du front, évidemment.

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Mais avant ce grand moment de stress, un petit coucou à la presse espagnole pour son arrogance risible et ses déclarations qui doivent leur donner de bonnes aigreurs d'estomac. A Arragones, qui peut manger ses propos racistes par le trou de balle, qu'il doit avoir bien gercé ce matin. Et évidemment, un gros coucou à l'AS Cannes : une passe décisive et un but de Vieira, un but de Zidane… c'est tout le centre de formation qui peut être fier, encore une fois. C'est bassement chauvin, ouais. Mais dans ces instants où toute la France bascule dans l'admiration, ceux croyant aux Bleus depuis France-Suisse (coucou aussi à Frei, tiens) peuvent bien s'assumer avec arrogance, non ? Jusque dans la défaite.

25 juin 2006

Haute Fidélité

pluie1En ce dimanche pluvieux (merci l'été parisien), je me sens possédé par l'esprit de Rob Gordon, héros du roman de Nick Hornby "Haute Fidélité" (et de sa merveilleuse adaptation cinéma "High Fidelity"), et me lance donc dans un petit Top des meilleures chansons dont le titre comprend le mot "rain"... 1- Ann Peebles "I Can't Stand The Rain" Petite perle soul à la rythmique chaloupée et dont l'instrumentation affiche quelques sonorités rappelant le bruit des gouttes finissant leur existence dans les flaques du quotidien. C'est beau, moite en diable, et les cuivres sont tout simplement dantesques. Et puis cette voix mes amis... Classe. 2- The Go-Betweens "The Sound of Rain" Grant McLennan, chanteur des Go-Betweens est décédé le 6 mai dernier et ce petit classement est l'occasion de lui rendre hommage. Formé en 1978 à Brisbane, ce groupe cultissime mais peu connu du grand public a accumulé des dizaines de perles rock et/ou pop. Ce "Sound of Rain" témoigne d'un songwriting aussi rigoureux que débridé. Une oreille lointaine pourrait croire que les Stones ou les Kinks sont derrière ce bijou... 3- Gwen McRae "It Keeps on Raining" La panthère de la soul qui feule durant 3'17... Où l'on comprend bien que la pluie peut réellement peser sur le système moral, surtout quand l'être aimé s'est barré sans crier gare. De la soul tranchante et aérienne : batterie cotonneuse, guitares toutes voiles dehors, piano dégingandé et chant habité. Si vous n'arranguez pas les dieux de la pluie après ça, je veux bien me faire curé. 4- Jimi Hendrix "One Rainy Wish" Il y avait le choix chez Jimi, niveau pluie ("Rainy Day, Dream Away" et "Still Raining, Still Dreaming", délires psyché hautement recommandables), mais ce "One Rainy Wish" s'impose comme le champion toutes catégories. Hendrix dans toute sa splendeur : riff de folie, mélodies imparables, basse à décorner un boeuf et ce surplus de magie inexplicable. Voilà qui conclura une journée pluvieuse de la meilleure façon qui soit. 5- Joe Purdy "I Love The Rain the Most..." ..."when it stops". Alors là, encore du très très lourd avec ce magicien folk totalement inconnu ici et ailleurs. Le bonhomme a signé quelques immenses chansons pour les séries LOST ("Wash Away") et GREY'S ANATOMY ("Suit Case") mais reste éloigné de tous les classements de vente. Pourtant, la seule écoute de ce chef d'oeuvre devrait suffire à en faire une star... Cette mélodie plaintive, ces guitares acoustiques entrelacées, cette voix de redneck au coeur tendre, et cette mélancolie lancinante : de quoi faire souffrir les romantiques du monde entier. 6- Randy Crawford "Purple Rain" Oui, vous allez me dire : pourquoi sélectionner une reprise et ne pas se contenter de l'originale ? Eh bien écoutez cette version jazzy-soul du classique de Prince et vous comprendrez pourquoi. La Crawford sait comment magnifier un morceau déjà sublime. Petites percus d'été, piano déchirant et une voix à transcender les zombies. Vous pouvez aussi essayer sa reprise de "Gimme the Night" de George Benson, mais là n'est pas le propos. 7- The Temptations "I Wish It Would Rain" Ambiance bord de mer avec des mouettes rugissantes. Les Temptations au summum de leur Art. Disserter plus longtemps est inutile. Tout est là, le son Motown dans toute sa splendeur, les Funk Brothers pieds au plancher et un classique de plus pour la Hit Factory de Detroit. 8- The Cascadess "Rythm of the Falling Rain" Oui, les Cascades ont un nom prédestiné pour les chansons aqueuses. Mais non, ils n'ont pas fait que des chansons pluvieuses. Voilà un collier en diamants de magie pop. Si magique que l'on pourrait qualifier ça de "sunshine pop" si le tonnerre ne retentissait pas dans l'intro... Mais pourquoi donc les musiciens associent-ils toujours l'amour à la pluie ? Une question aussi problématique que la désormais classique : "Est-ce que j'écoute de la musique pop parce que je suis malheureux ou suis-je malheureux parce que j'écoute de la musique pop ?"... 9- Turin Brakes "Rain City" Ce groupe anglais a de l'or dans les doigts... Ce monument de contemplative souffrance provient de leur deuxième album "Ether Song", dont le titre illustre bien l'ambiance cotonneuse de ce "Rain City". 'Tain que c'est beau. 10- Travis "Why Does It Always Rain On Me ?" Parce que les classements crétins sont aussi faits pour les tubes, impossible d'oublier ce gigantesque hit de Travis, dont la musique aussi fouillée qu'évidente souffre malheureusement d'un déficit de crédibilité chez nos amis les bobos. Eh bien tant pis, la pop, quand elle est aussi épanouie, ne se refuse pas. Evidemment, les Top 10 sont comme les humeurs : changeants. Prochain état des lieux au prochain jour de pluie...
22 juin 2006

L'esprit gaulois me les brise

raymondvillepin

Nous voilà à la veille du dernier match de poule de l'équipe de France de football: France-Togo. Je vois déjà mes compatriotes fourbir les armes, les pics, les fourches, les crachats, et accessoirement le venin. J'entends ici ou là, quelques phrases définitives, comme autant de bon sens populaire, fleurir dans les bouches des Français : "Ah ça, pour faire des pubs, sont forts les Bleus, mais pour marquer des buts, hein !", "Sils se qualifient pas, ça leur fera les pieds à ces feignasses", ou encore l'inénarrable "Allez le Togo" et autres joyeusetés d'experts. Car oui, la France est faite de 60 millions d'experts, suffit de voir comme chacun donne son avis éclairé sur tout, tout le temps, partout. Et moi le premier.

Le plus énervant dans cette attitude du Français de base dont nous faisons malheureusement tous partie (Dieu nous garde de faire partie des importants), c'est cette façon de brûler les idoles aussi rapidement qu'on les a élevées au rang de divinités. Cet esprit gaulois, disons-le franchement, est plus qu'irritant. Il me casse même profondément les couilles. Loin de moi l'idée de ne pas critiquer les Bleus. Les gaillards n'ont pas couru de toute la deuxième mi-temps contre la Corée, se laissant endormir, apathiques. Raymond Domenech a coaché l'équipe comme s'il entraînait des minimes dans un championnat inter-écoles. Le tout pour un résultat nul bien frustrant. Donc, non pas d'excuses. Mais le fait de critiquer des faiblesses évidentes doit-il être inévitablement l'occasion pour cracher son venin et oublier bien vite ce que l'on a adoré la veille ? Personnellement, si les Français ne se qualifient pas, cela ne sera pas la fin des temps. Car j'ai vécu 1998 et 2000. J'espère seulement que si c'est le cas, le maillot sera trempé, les mollets durs comme du béton et les poumons enflammés.

Mais d'un autre côté, je n'attends qu'une chose : que les Bleus mettent la pâtée à nos amis togolais, et qu'un esprit se libère dans l'équipe. J'attends fébrilement que la France, dans sa versatilité légendaire et sa mauvaise foi de bas étage, se remette tranquillement à vibrer. Dès lors, on pourra voir les cuistres, les bas du front, les opportunistes gentiment retourner leurs vestes l'air de rien. Si les Bleus passent en huitième et se lancent dans un parcours dantesque (car oui, on a l'équipe pour) il sera bon de se délecter de l'attitude de tous ces connards qui depuis dix jours bavent à l'idée de voir les footeux hexagonaux rentrer plus tôt à la maison. Rien que pour les dézinguer en place publique.

Et là, depuis dix jours justement, je me demande une chose… Et si ce foutu esprit gaulois n'était pas tant un signe d'hypocrisie mal placée qu'un révélateur de l'état moral de la France ? Et si le Français bas du front fouettait les Bleus uniquement pour s'auto-flageller ? Et si l'équipe de France de foot n'était que le prisme d'un mal être général de nos chers compatriotes ? Il est toujours plus facile de brûler les idoles que l'on aime plutôt que de descendre dans la rue foutre le feu à ceux qui pourrissent vraiment notre vie (grands patrons, hommes de droite castrateurs, bien pensants bouffant du caviar, esclavagistes de tout poil etc). Et si le Gaulois s'en prenait tout simplement aux Bleus pour mieux signifier sa douleur, sa peine ?

Il est d'ailleurs assez poilant de voir comment Raymond Domenech et Dominique de Villepin sont deux figures quasi identiques d'hommes de pouvoir intransigeants, dépassés par leurs responsabilités. Raymond de Villepin et Dominique Domenech. Le sélectionneur est critiqué de toutes parts, mais ne fléchit pas : il laisse Vieira à droite, laisse Henry seul en pointe, ne veut pas sélectionner Ribéry etc. Puis, devant la fronde, remet Vieira au centre, balance Trézéguet à côté d'Henry, sélectionne Ribéry… Si ça continue, il nous fera les toasts le matin si on le lui demande. De son côté, de Villepin, entre autres, ne veut pas retirer le CPE, insulte Hollande et au final… retire le CPE et présente ses excuses aux députés. Deux hommes sûrs de leurs avis, les imposant comme s'ils étaient des dogmes, se retrouvant bien dans la merde quand tout le monde les conteste, et qui finissent par flancher. Mais jamais comme il faut. On aurait aimé que Raymond fléchisse sur Giuly et que de Villepin démissionne. Mais bon, non. Tant pis. Je sais, j'suis jamais content. Putain d'esprit gaulois.

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22 juin 2006

La fête des moisis

Donc, toute la France sombre le temps d'une soirée dans la célébration béate de la musique, en un élan national. Comme la fête du cinéma, il est temps pour la plèbe de découvrir que l'Art existe. Il est temps de se ruer dans la rue pour écouter des amateurs dézinguer du Beatles au pipeau, massacrer du MC5 à la scie électrique ou seriner du Jacques Dutronc d'une voix de falsetto casse burnes. Comme la fête du cinéma qui ne semble consacrée qu'aux adolescents boutonneux s'ingurgitant dix daubes à la suite en trois jours ou aux adeptes des soirées TF1 ne faisant vivre le cinéma que pour aller voir la dernière diarrhée de Besson, la fête de la musique semble faire vibrer qu'une tranche bien inculte de la population. Ceux se gavant de NRJ, de Fun Radio, de Michel Drucker ou de Star Ac'... Une bande d'ahuris kiffant la vibe avec leurs mecs sur des dancefloors moisis, et tournant la tête sur du Mouise Pokora.
Cette frange de la population, trop bête pour zapper quand un programme télé les abrutit ou trop pauvre pour se cultiver comme ils auraient le droit de le faire (rayer la mention inutile), on l'a vue en direct, sur France 2, se dandiner sur tout ce que la musique française a de plus moisi. Tous alignés en rang d'oignon, les esclaves de Pascal Nègre se sont donnés le change lors d'un grand show très service public, donné à La Défense. Ils étaient tous là. Observés d'un oeil à la mi-temps et à la fin d'un Argentine-Pays Bas aussi passionnant d'un épisode de "Plus Belle La vie", "les artistes" de la musique française populaire ont encore démontré leur inconsistance.
Les escrocs étaient de sortie : les braqueurs de vieille (Bruel and co) ou les voleurs d'argent de poche (Lorie, M. Pokora and co). Devant ce spectacle de sinistre mémoire dont le mot "musique" était définitivement banni, on se dit que payer la redevance reste une profonde douleur anale. Servir la soupe, faire de la promo pour toute une bande de cooptés miteux ne sachant pas aligner trois sons non formatés... Bref, le service public dans toute sa splendeur.
Pourtant, la musique française comporte bien quelques dignes représentants (Phoenix, Hushpuppies, Rhesus, Dominique A, pour ne citer que ceux venant immédiatement à l'écriture) : mais ces jeunes chevelus et chauves pourraient-ils faire de l'audience ? Sans doute pas.
La fête de la musique reste donc cette vitrine plate et inconsistante d'une musique bien rangée, bien cataloguée, plaisant à Max Guazzini et Cauet et faisant encore un peu plus sombrer la populace dans le marasme culturel qui semble bien être le sien. On a que ce qu'on mérite, semble-t-il. La fête de la musique, ou comment faire croire que cet Art majeur est à la portée de tout le monde, du premier branque qui passe et qui a eu le mérite de sucer Pascal Nègre jusqu'à la garde...
Devant tous ces escrocs millionnaires se plaignant pour leurs droits d'auteur et assénant leurs croutes rances, on se dit que la jeunesse française n'emmerde pas que le front national, elle emmerde aussi l'industrie musicale. Et se connecte à Gnutella et Bittorrent pour écouter des artistes intéressants avant de savoir si elle aura la thune pour acheter le disque et se payer une place de concert. Si les radios et les télés généralistes, dont ce magnifique service public se branlant parce qu'il diffuse Taratata, donnaient un peu plus de place à la diversité, ceux ayant soif de découverte auraient sans doute moins besoin de télécharger. Avant de savoir si un disque est suffisamment bon pour claquer 25 euros.
Pendant que France 2 finit de se rouler dans la fange, je retourne à ma platine CD écouter quelques bonnes choses et me faire une fête de la musique perso. Qui de toute façon, pour ma part, dure 365 jours par an. And I stick my middle finger to Univers Sale.

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